Tout d'abord, le bois est le matériau le plus utilisé dans presque tous les pans de l'activité humaine. On s'en sert pour le chauffage, ou la construction d'habitations et d'ouvrages d'art, la fabrication d'outils et d'armes et aussi sous forme de charbon pour la métallurgie (fonderie et forge) et la verrerie. Il s'impose vite comme étant l'élément moteur de toute l'économie. Certains auteurs qualifient même l'Europe médiévale de civilisation du bois.
L'importance du bois est aussi attestée par le lexique : en latin médiéval le mot materia désigne avant tout le bois de construction, et par extension, tous les autres matériaux. Le bois est la matière par excellence.
À partir du milieu du XIIe siècle, l'industrie et le commerce du textile dégagent des profits de plus en plus grands et ce à une échelle européenne puis mondiale. Il finira par supplanter le bois au XIIIe siècle, devenant l'objet de toutes les passions et étant à l'origine des plus grandes fortunes européennes. Là aussi, le lexique atteste cette nouvelle hégémonie, le terme étoffe désignant en moyen français le textile, et par extension tous les matériaux. Ce sens du mot « étoffe » se retrouve de nos jours dans l'expression « avoir l'étoffe de... » qui signifie « être fait du même bois que... », et la boucle est bouclée.
LES METIERS :
• Le Bûcheron, premier maillon de la chaîne :
Un bûcheron est un professionnel de l’abatage des arbres (à ce qu'il paraît!)
Son rôle est donc de couper les arbres, les ébrancher afin de produire des grumes*, les branches sont débitées en bois de chauffage.
*Une grume est un tronc arbre ébranché mais non écorcé.
(Vit-il dans la forêt ? Transporte-t-il les grumes en ville ? Si oui, par quels moyens?)
• Les Scieurs de long :
Le métier de scieur de long dont l'origine est pluri-millénaire, n'est reconnu que depuis le XVe siècle comme une profession à part entière. Les scieurs de long sont chevriers ou renardiers (Celui qui se trouve en haut de l'échafaudage se nomme « chevrier », celui qui est en dessous se nomme « renardier »). Debout sur la grume, le chevrier remonte la scie, qui descend ensuite de son propre poids, aidée par l'impulsion du renardier qui se situe en dessous.
(scieurs de long satyre sociale : le renardier en dessous est l’apprenti, le chevrier est le maitre représenté sous la forme d’un âne)
(scieurs de long japonais par Hokusai : les 2 hommes travaillent en parallèle pour plus d’efficacité, l’homme en bas affûte une scie sur un billot)
• Le Charpentier :
Actuellement, il réalise et pose des assemblages participant à la constitution de l'immeuble dont les composantes sont la charpente et l'ossature générale.
Jusqu'à la révolution industrielle son métier s'exerce exclusivement avec du bois.
Le métier de charpentier recouvre tous les métiers du bois de fuste (de construction, opposé au bois de chauffe) qui participent à la construction des cathédrales, des églises, des abbayes, des forteresses et des maisons à pans de bois en réalisant les charpentes, les moules de voûtes ainsi que les échafaudages et les appareils de levage : grues, roues à écureuil, etc.
(La corporation des charpentiers regroupait plusieurs spécialités de métiers, à savoir les charpentiers grossiers qui faisaient les planchers, les combles et autres gros ouvrages du bâtiment, les huchiers, fabricants de coffres et de huches, les huissiers qui faisaient les huis (portes en bois), les tonneliers, les charrons et charretiers, les couvreurs qui revêtaient les combles de tuiles de bois, les cochetiers (fabricants de coches d'eau) et les faiseurs de nez (fabricants de petits bateaux), les tourneurs et les lambrisseurs ou lambroisseurs, auxquels on devait les lambris.)
(blason de la guilde des charpentiers de la ville de Liège)
• Le Menuisier :
La menuiserie est l'ensemble des techniques mises en œuvre pour construire des ouvrages de taille relativement petite (par opposition aux ouvrages de charpente) par la mise en forme et l'assemblage de menues pièces de bois. Ces assemblages se font de largeur, de longueur ou en angle.
Par extension, on parle de menuiseries pour désigner les ouvrages dont la conception répond à cette définition : ils doivent être en bois massif et assemblés selon les techniques traditionnelles (ex : à tenon et mortaise, à queue d'aronde, etc. A différencier des assemblages utilisant uniquement colle et vis).
En 1382, un arrêt royal ordonne qu'on distingue à l'avenir les menuisiers des charpentiers. Jusque-là les menuisiers (du mot minitarus qui signifie : ouvrier travaillant à de menus ouvrages) étaient confondus sous le terme général de Charpentiers avec le qualificatif de "Charpentier de la petite cognée". Les outils et ouvrages deviennent tellement différents qu'une distinction devient alors nécessaire.
• L'ébéniste :
Le mot ébénisterie apparaît dans le dictionnaire de l'Académie en 1732 pour la première fois ; pour le différencier du terme menuiserie, car les artisans ébénistes, en plus des techniques de la menuiserie font appel à la marqueterie, au placage et à la tabletterie. Il est tiré du mot ébène et désigne le bois de l'ébénier, de couleur noire. C'est le travail de cette essence précieuse qui a donné le nom au métier chargé d'ouvrage « à caractère plus décoratif qu'utilitaire ».
Ce métier apparaît tardivement avec une évolution de l'outillage et de techniques permettant de travailler plus finement le bois, nous n'en parlerons donc pas.
•Les Guildes :
Une guilde désignait au Moyen- Age une association ou coopération de personnes pratiquant une activité commune, généralement des marchands, qui, s'étant dotés de règles et de privilèges spécifiques, demandaient protection aux autorités d'une ville ou d'un État.
Les premiers échos qui font mention de guildes remontent au règne de Charlemagne. Des groupes organisés en confrérie assurent la sécurité du transport de marchandises, se promettent assistance mutuelle et soins en cas de catastrophes.
Les guildes corporatives (se regroupant donc par corps de métiers) réunissaient des artisans d'une même profession. Elles étaient très hiérarchisées et comprenaient des apprentis et des compagnons, puis les maîtres et patrons parmi lesquels étaient choisis les représentants de la corporation, appelés jurés. Leurs règlements devinrent de plus en plus stricts, fixant les prix, les modalités de fabrication, les conditions de travail et les usages afin d'éviter toute concurrence.
Réglementation
Il était défendu :
1. De travailler les samedis et les veilles des fêtes, après vêpres en temps ordinaire et après complies en temps de carême, afin de bien se préparer à la solennité du lendemain
2. De travailler la nuit, dans la plupart des métiers
3. De travailler en dehors de la vue du public, ce que l’on appelait « ouvrer en cachette »
4. De s’associer entre artisans.
Chacun des métiers ne pouvait empiéter sur un autre métier : ainsi le huchier qui fabriquait les huches, pétrins, coffres divers, etc. ne pouvait aucunement fabriquer les portes ou les fenêtres comme l’huissier, ni les lambris comme le lambrisseur, pas plus que ces deux sortes d’ouvriers spéciaux ne pouvaient fabriquer les coffres. D’autres prescriptions particulières existaient dans tous les métiers.
Nous pourrions aisément ajouter des métiers à cette liste mais nous en resterons là pour plus de simplicité. Nous pouvons tout de même évoquer les charliers ou charrons : fabricants de roues, les mairniers : marchands de bois de construction ronds, carrés ou fendus, ainsi que les cuveliers : fabricants de tonneaux, cuvelles et seaux de bois.
Ceci est une liste non exhaustive qui peut être amenée à des modifications futures
Le Bois
Modérateur : Andrieu Dervenn
Re: Le Bois
LA FORÊT :
Si vous vous imaginez une Europe médiévale verdoyante et couverte de forêts denses et obscures, détrompez-vous ! En effet, à partir du Xe siècle, des phénomènes se conjuguent et entrainent un défrichement massif des forêts.
Tout d'abord un nouvel essor économique et une augmentation démographique importante : on cherche de nouvelles terres à mettre en culture (champs, vignes).
On observe également la création de nouvelles constructions. Lorsqu'un seigneur s'établit sur un territoire, il donne des terres à défricher aux paysans pour qu'ils s'installent.
Par ailleurs, durant toute cette période, les communautés monastiques se développent énormément et nombre d'entre elles vont s'établir en forêt, soit parce qu'elles recherchent des zones où s'isoler, soit parce qu'on leur cède des terres incultes plus ou moins envahies par la forêt. Tout comme les paysans, les moines jouent donc un rôle important dans le défrichement du milieu forestier.
Enfin, les progrès techniques doivent aussi être mentionnés : développement de l'outillage et utilisation croissante du fer, invention de la charrue...
Le développement des activités artisanales et industrielles comme la céramique, la métallurgie et le verre nécessitent également une grosse production en bois et charbons de bois.
Cette utilisation intensive entraîne rapidement une surexploitation des ressources, ce qui pousse dès le XIIIe siècle les administrations locales à limiter son emploi (obligation de construire en pierre dans certaines villes, par exemple) et tend à rationaliser l'exploitation des forêts. En France, la proportion du territoire couvert de forêts atteint son minimum historique au tournant du XIIIe siècle. Cette pénurie relative s'explique aussi par l'intense commerce dont le bois fait l'objet dès l'an mil, l'Europe du Nord exportant massivement sa ressource vers l'Europe méridionale et les pays de l'Islam, d'autant plus dépourvue qu'un réchauffement climatique sévit à l'époque.
L'exploitation des richesses de la forêt va faire peu à peu l'objet d'une codification. Le seigneur, s'il détenait le pouvoir sur les bois, devait en partager l'usage avec la communauté paysanne. Même si la forêt reste le lieu de chasse exclusif du seigneur, le peuple pouvait venir se servir selon ses besoins. Le droit d'affouage permettait de ramasser du bois pour le feu, le droit de marronnage autorisait la coupe de perches pour fabriquer des piquets et outils, ceux de panage et de glandée permettaient d'amener des porcs dans une chênaie et de ramasser des glands.
Petit interlude : Origine de l’expression « Glander » (on dit aussi glandouiller), en langage très familier, argotique, signifie ne pas faire grand-chose, paresser, perdre son temps. Vous vous en doutez, ce verbe vient de gland (celui des chênes, évidemment !). Dès le Moyen Âge, il était de coutume de faire glander les cochons, on dit qu’ils allaient à la glandée. En réalité, que faisaient ces troupeaux ? Ils mangeaient les glands tout simplement. Mais ils n’étaient pas seuls, le porcher chargé de les accompagner était appelé le glandeur. Il s’agissait d’une tâche assez facile, puisqu’il fallait juste surveiller les cochons. Le terme populaire « glander » pourrait venir de là. Il existe d’autres explications, notamment par rapport au XVIe siècle où les seigneurs autorisaient les paysans les plus pauvres à ramasser des glands. L’occupation était jugée peu rentable, beaucoup de temps pour pas grand-chose.
Les grands délimitèrent sur leurs domaines des espaces protégés, surveillés par des agents seigneuriaux, où les manants devaient payer l'accès au bois quand il n'en étaient pas interdits. Cette privatisation d'une partie des forêts répondait aussi à des raisons financières : avec l'essor des villes et de l'artisanat, le bois devenait une marchandise (bois d’œuvre et bois de feu). La gestion devint aussi plus rationnelle avec des coupes réglées, planifiées dans le temps, et la préservation de baliveaux, jeunes arbres destinés à repeupler les bois avec leurs semis. En 1318, Philippe V fonda pour les forêts royales la maîtrise des Eaux et Forêts, chargée de la conservation des bois, de la police des eaux navigables, du curage des rivières, de la surveillance de la chasse et de la pêche.
Malgré ça, la forêt reste un lieu sombre et apprécié des brigands, des braconniers, ainsi que des ermites qui cherchent l’isolement.
Les débuts des troubles de la Guerre de Cent Ans et surtout la Grande Peste (entre 1347 et 1349 en France) causeront la mort de plus d'un tiers de la population. De nombreux villages seront abandonnés et beaucoup de terres agricoles vont retourner à la friche et se reboiser.
Si vous vous imaginez une Europe médiévale verdoyante et couverte de forêts denses et obscures, détrompez-vous ! En effet, à partir du Xe siècle, des phénomènes se conjuguent et entrainent un défrichement massif des forêts.
Tout d'abord un nouvel essor économique et une augmentation démographique importante : on cherche de nouvelles terres à mettre en culture (champs, vignes).
On observe également la création de nouvelles constructions. Lorsqu'un seigneur s'établit sur un territoire, il donne des terres à défricher aux paysans pour qu'ils s'installent.
Par ailleurs, durant toute cette période, les communautés monastiques se développent énormément et nombre d'entre elles vont s'établir en forêt, soit parce qu'elles recherchent des zones où s'isoler, soit parce qu'on leur cède des terres incultes plus ou moins envahies par la forêt. Tout comme les paysans, les moines jouent donc un rôle important dans le défrichement du milieu forestier.
Enfin, les progrès techniques doivent aussi être mentionnés : développement de l'outillage et utilisation croissante du fer, invention de la charrue...
Le développement des activités artisanales et industrielles comme la céramique, la métallurgie et le verre nécessitent également une grosse production en bois et charbons de bois.
Cette utilisation intensive entraîne rapidement une surexploitation des ressources, ce qui pousse dès le XIIIe siècle les administrations locales à limiter son emploi (obligation de construire en pierre dans certaines villes, par exemple) et tend à rationaliser l'exploitation des forêts. En France, la proportion du territoire couvert de forêts atteint son minimum historique au tournant du XIIIe siècle. Cette pénurie relative s'explique aussi par l'intense commerce dont le bois fait l'objet dès l'an mil, l'Europe du Nord exportant massivement sa ressource vers l'Europe méridionale et les pays de l'Islam, d'autant plus dépourvue qu'un réchauffement climatique sévit à l'époque.
L'exploitation des richesses de la forêt va faire peu à peu l'objet d'une codification. Le seigneur, s'il détenait le pouvoir sur les bois, devait en partager l'usage avec la communauté paysanne. Même si la forêt reste le lieu de chasse exclusif du seigneur, le peuple pouvait venir se servir selon ses besoins. Le droit d'affouage permettait de ramasser du bois pour le feu, le droit de marronnage autorisait la coupe de perches pour fabriquer des piquets et outils, ceux de panage et de glandée permettaient d'amener des porcs dans une chênaie et de ramasser des glands.
Petit interlude : Origine de l’expression « Glander » (on dit aussi glandouiller), en langage très familier, argotique, signifie ne pas faire grand-chose, paresser, perdre son temps. Vous vous en doutez, ce verbe vient de gland (celui des chênes, évidemment !). Dès le Moyen Âge, il était de coutume de faire glander les cochons, on dit qu’ils allaient à la glandée. En réalité, que faisaient ces troupeaux ? Ils mangeaient les glands tout simplement. Mais ils n’étaient pas seuls, le porcher chargé de les accompagner était appelé le glandeur. Il s’agissait d’une tâche assez facile, puisqu’il fallait juste surveiller les cochons. Le terme populaire « glander » pourrait venir de là. Il existe d’autres explications, notamment par rapport au XVIe siècle où les seigneurs autorisaient les paysans les plus pauvres à ramasser des glands. L’occupation était jugée peu rentable, beaucoup de temps pour pas grand-chose.
Les grands délimitèrent sur leurs domaines des espaces protégés, surveillés par des agents seigneuriaux, où les manants devaient payer l'accès au bois quand il n'en étaient pas interdits. Cette privatisation d'une partie des forêts répondait aussi à des raisons financières : avec l'essor des villes et de l'artisanat, le bois devenait une marchandise (bois d’œuvre et bois de feu). La gestion devint aussi plus rationnelle avec des coupes réglées, planifiées dans le temps, et la préservation de baliveaux, jeunes arbres destinés à repeupler les bois avec leurs semis. En 1318, Philippe V fonda pour les forêts royales la maîtrise des Eaux et Forêts, chargée de la conservation des bois, de la police des eaux navigables, du curage des rivières, de la surveillance de la chasse et de la pêche.
Malgré ça, la forêt reste un lieu sombre et apprécié des brigands, des braconniers, ainsi que des ermites qui cherchent l’isolement.
Les débuts des troubles de la Guerre de Cent Ans et surtout la Grande Peste (entre 1347 et 1349 en France) causeront la mort de plus d'un tiers de la population. De nombreux villages seront abandonnés et beaucoup de terres agricoles vont retourner à la friche et se reboiser.
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Re: Le Bois
Bertille a écrit :(Vit-il dans la forêt ? Transporte-t-il les grumes en ville ? Si oui, par quels moyens?)
pour le transport du bois je viens de tomber sur cet article de guedelon qui explique ca très bien, photos à l'apui
il est assez complémentaire aux informations présentes ici
http://www.benevoleguedelon.com/pages/L ... 91259.html
Re: Le Bois
Intéressant! J’étais tombée aussi sur un article où ils transportaient les grumes par voie d’eau mais je ne le trouve plus et je ne sais plus si c’était à notre période ou pas...
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