L'alimentation paysanne du Xe au XVe siècles

Divers, fourre-tout au sujet du Moyen Age

Modérateur : Andrieu Dervenn

Tascha

L'alimentation paysanne du Xe au XVe siècles

Message non lupar Tascha » 28 sept. 2017 10:17

Publié le 22 mars 2009 par Jehanne et Héloïse du blog http://cuisine-medievale.over-blog.com/ ... 39292.html


A partir du Xe siècle, on constate une forte évolution de la structure des sociétés européennes. La période du XIe-XIIIe siècles se caractérise d'abord par une forte croissance démographique et une évolution des structures économiques ce qui transforme les rapports sociaux.
Entre 1000 et 1350, la population passe d'environ 12 millions à 35,5 millions d'habitants en Europe occidentale et centrale et de 17 à 25 millions d'habitants en Europe méditerranéenne.
Les échanges monétaires et le commerce européen connaissent un essor important. L'économie de marché s'ajoute alors à l'économie de subsistance traditionnelle du haut Moyen Age. Les campagnes et surtout les villes commencent à sortir de leur autarcie.
Le système agro-sylvo-pastoral perd alors de son importance.


Les conséquences de la mise en place de la société féodale sur l'alimentation:


La naissance de la féodalité, à partir du Xe siècle, bouleverse le travail du paysan et ses rapports avec les nobles. Les droits seigneuriaux s'alourdissent. Les paysans doivent payer des impôts à leur seigneur. Il sont dans l'obligation d'utiliser le moulin, le four ou le pressoir banals, construits par le seigneur, contre une rétribution. Le droit de chasse et de pêche est accaparé par les nobles et les paysans perdent en partie cet apport alimentaire; en partie seulement puisque le braconnage est une pratique assez fréquente.

D'autre part, la croissance démographique et l'essor urbain à partir du XIIe sicèle provoquent une augmentation des besoins alimentaires. Les seigneurs font alors pression sur leurs paysans pour qu'ils intensifient leurs cultures dans le but d'en tirer un profit monétaire et de vendre les récoltes sur les marchés urbains. C'est la naissance d'un système agraire fondé sur l'accumulation des réserves en céréales pour la vente. Ce système provoque une diminution de la superficie des forêts et une augmentation des terres cultivées en céréales grâce aux défrichements qui se généralisent dans toute l'Europe.
Aux XIIe et XIIIe siècles, l'agriculture progresse et s'intensifie grâce à quelques innovations. L'outillage s'améliore grâce au développement de la sidérurgie. La force animale est mieux utilisée avec l'adoption du joug frontal pour les boeufs et du collier d'épaule rigide pour les chevaux et les mules. Le paysan peut ainsi faire des labours plus profonds et labourer des terres lourdes. La multiplication de ces labours permet également de diminuer le temps de jachère. Les européens passent ainsi d'un système de culture biennal à un système triennal. La terre n'est plus cultivée un an sur deux mais deux ans sur trois. Une parcelle est cultivée en blé d'hiver pendant un an, puis en avoine ou orge l'année suivante. La troisième année, elle est laissée en jachère. Ce système permet aussi d'augmenter les surfaces cultivées. Les rendements progressent pendant cette période.

Le régime paysan:


L'alimentation rurale commence à se dissocier de l'alimentation urbaine à cette époque. Elle perd la variété qui la caractérisait au haut Moyen Age. La cueillette et la chasse deviennent des activités marginales. La cueillette est réservée aux pauvres ou aux temps de crise et la chasse est devenue l'exclusivité des nobles. Le régime alimentaire est basé sur le pain noir ou la bouillie, des soupes et de la viande de porc souvent salée. La part du pain dans l'alimentation augmente sans cesse alors que celle de la viande diminue. Le pain du paysan est souvent fait avec des céréales secondaires comme de l'orge, du seigle ou de l'épautre. Le blé est réservé aux impôts seigneuriaux et à la vente sur le marché. La bouillie est moins consommée qu'à la période précédente parcequ'elle est considérée comme un plat de pauvre. L'importance culturelle du pain s'accroît. Les quantités de viande consommées diminuent aussi pour de multiples raisons. Les terres incultes et des forêts qui étaient les principales zones de paturages diminuent en superficie ce qui provoque une diminution du nombre d'animaux élevés. De plus une partie importante de la viande élevée est réservée à la vente sur les marchés urbains car c'est un produit cher et donc qui rapporte de l'argent aux familles paysannes. Ainsi la consommation de poules et d'oies diminuent au profit de la vente des oeufs et de la viande. Il en est de même pour le vin, le jambon, le fromage et le poisson salé. Pour les paysans ce sont presque des aliments de luxe, réservés aux jours de fêtes.
Avec l'extension de l'interdiction de la chasse pour les paysans, la consommation de gibiers diminue également.
Néanmoins les légumes sont toujours cultivés dans les potagers: fèves, lentilles, pois chiches, gesses, épinards, courges, choux, oignons, ail, poireaux, navets. Ces végétaux forment les ingrédients variés des soupes qui sont un plat quotidient avec le pain.Celui-ci est souvent confectionné et cuit une fois par semaine ou tous les quinze jours pour éviter une trop grande perte de temps et d'argent en combustible et en taxe pour l'utilisation du four banal. La paysanne confectionne de larges miches de pain de farine de seigle ou de mélange. Ces céréales sont pauvres en glutten et le pain lève donc difficilement. La mie est compacte. Pour manger plus facilement ce pain, les paysans le trempent alors dans la soupe. Cette alimentation est plus monotone et moins équilibrée qu'à la période précédente mais suffit à nourrir correctement les populations.

Vers un déséquilibre du système agricole et alimentaire:

Dans une année normale, seuls les pauvres et les mendiants souffrent de la faim. Mais une mauvaise récolte peut devenir dramatique car le régime alimentaire est centré sur les céréales. Le peuple souffre alors rapidement de disette. Il va chercher une alimentation de subsistance dans les forêts. Pendant le Moyen Age centrale, on compte une crise alimentaire régionale tous les 25 ans environ. Il y a eu quatre grandes crises européennes: 1005-1006, 1032-1033, 1195-1197, 1224-1226. Mais l'insuffisance de l'engrais, la puissance limitée de l'outillage agricole et la réduction de la jachère épuisent les sols et les rendements commencent à diminuer. A partir de 1300, les mauvaises récoltes se multiplient. Le XIVe siècle est secoué par deux grandes famines, en 1315-1317 sur les côtes atlantiques et en 1346-1347 sur tout le continent. Puis l'année 1348 est marquée par le retour de la peste noire en Europe. L'épidémie qui touche des populations déjà affaiblies par la disette fait des ravages dans toute l'Europe. La fin du Moyen Age est marquée par une trés forte crise démographique et une diminution de la population. Dans ce contexte, les européens renouent avec l'économie sylvo-pastorale du haut Moyen Age.
A cause de la chute démographique, les besoins alimentaires sont quantitativement moins importants. De nombreuses exploitations sont abandonnées et la superficie des terres incultes augmente ce qui permet de développer à nouveau l'élevage. La consommation de viande s'accroît momentanément. Mais dès la seconde moitié du XVe siècle, la culture des céréales reprendre sa place dominante et fait à nouveau reculer l'élevage.


A partir de la Renaissance, l'agriculture est à nouveau centrée sur la production de céréales ce qui fragilise toujours plus l'équilibre alimentaire et rend les populations plus vulnérables aux mauvaises récoltes et aux crises alimentaires. Cependant, pendant toute l'Epoque Moderne, les champs et surtout les jardins s'enrichissent de nouvelles plantes comme la luserne pour les animaux, les haricots qui ont un grand succès, les melons, les artichauts, les betteraves, les asperges, le maïs dans le sud ouest de la France et en Espagne à partir du XVIIIe siècle,...

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